Octobre et novembre 2023

La moiteur douce de l’automne enveloppe les milliers de touristes qui débarquent d’avions bondés, en quête du frisson balnéaire promis par les catalogues des agences de voyage avec une petite touche d’archéologie qui transformera leur semaine all inclusive en voyage culturel inoubliable…

Se sentir en marge, hors de la marche du monde, dans la longue file d’attente d’un taxi qui m’emmènera avec deux pleines valises  – médicaments, matériel médical, un peu de chocolat aussi – à la place Victoria, à deux stations de métro de Monastiraki où les hordes de touristes s’agglutinent sur les terrasses devant leur assiette de souvlaki et de salade grecque, levant rarement les yeux pour admirer les vestiges illuminés de l’Acropole, ou encore s’émerveillant du folklore local près de Syntagma.

Le contraste est rude avec les familles de sans-abris de la place Victoria qui seront chassées sans aucune émotion en quelques minutes- coup de poing dans la fourmilière- par les duos de policiers qui tuent les nombreuses heures de faction un gobelet de café dans une main, une cigarette dans l’autre, indifférents à la marche du monde et aux voisins miséreux.

Revoir de nombreux patients, expliquer les résultats des examens effectués dans les hôpitaux qui ne font jamais l’objet d’information ni d’examen clinique, illustrer les consignes de protection articulaire, répéter les conseils d’alimentation et d’hydratation, distribuer quelques médicaments de base pour une automédication sûre et efficace, accompagner un de nos locataires chez la psychologue et actualiser le traitement avec le psychiatre.

Continuer sans relâche de soutenir psychologiquement Sou.., Tid…. Pau.., qui attendent une décision administrative depuis plus de cinq ans et dont les dates de dépôt des recours sont sans cesse repoussées malgré la diligence des avocats

Se sentir peu efficace, voire impuissant en médecine de rue par manque de moyens, près de la place Omonia, où se rassemblent sans-abris, réfugiés, toxicomanes

Evaluer les documents médicaux d’une jeune gambienne, à la demande de l’assistante sociale d’une ONG partenaire pour lui éviter la rue. Elle doit quitter dans les 48 heures le camp qui l’héberge depuis de nombreux mois, faute de place selon les autorités grecques de l’asile, malgré son traitement médical lourd et donner le feu vert pour l’accueillir dans l’appartement de Choosehumanity, puis l’y installer. Refaire un bilan médical complet pour mieux saisir ses multiples problèmes médicaux pulmonaires, cardiaques, rhumatologiques et organiser le suivi du traitement.

Mettre la main à la pâte avec le trio de choc de Choosehumanity présent à Athènes : Mary, Caroline, Paul, puis finir la journée de travail par la nécessaire récupération des forces…

Assister les protégés, acheter des provisions de base et les bons de nourriture, distribuer le financement mensuel des loyers, réparer le chauffe-eau, la fuite d’eau d’un lavabo, exterminer quelques nuisibles, améliorer l’intendance, relancer la convivialité avec des repas en commun dans un petit restaurant afghan ou déguster dans un des appartements un repas de spaghettis sauce bolognaise préparé par Caroline, ou de poulet mafé par Mary – entretenir la solidarité et l’amitié…

S’inquiéter tous ensemble de la disparition de P., retrouvé avec soulagement après une semaine d’inquiétude dans un hôpital, participer aux actions de SOS refugees, collaborer avec Light House Relief et son assistante sociale, préparer puis distribuer des repas chauds dans la rue avec Help Your Neighbor.

Écouter avec tristesse les propos de désespoir et d’angoisse du tenancier palestinien d’un petit café place Amerikis…

Rencontrer par hasard un couple de volontaires irlandais qui se sont engagés à participer au financement de quelques projets. Grand merci à eux.

Merci à vous toutes et tous de nous soutenir et d’aider Choosehumanity à apporter un peu d’humanité à Athènes, à Fribourg, à Lausanne et ailleurs en Suisse, avec l’espoir qu’en Grèce  et ici  mais aussi en Palestine, en Israël, au Liban, en Syrie et partout dans le monde la paix, la fraternité, le respect du voisin efface la souffrance de nos frères démunis et souvent abandonnés.

Rappel de ce proverbe kabyle, découvert dans le roman d’un auteur congolais : « En me promenant dans le désert, j’ai vu au loin un animal sauvage. En m’approchant, j’ai vu que c’était un homme. En m’approchant davantage, j’ai reconnu mon frère ».

Avec amitié,

Doc Pierre