Le 6ème voyage sur l’île s’est achevé fin juin avec une nouvelle collaboration entre Medequaliteam et Choosehumanity. Semaines difficiles à cause du frein des autorités qui ralentissent l’accès au traitement des pathologies sévères et compliquées et par des situations de plus en plus précaires et incertaines, pour tous les réfugiés, que l’asile soit rejeté ou accepté.

Futur incertain avec le transfert en septembre dans un nouveau camp, en pleine nature, à 8 km de la ville : multiples containers de 6 places alignés les unes à côté des autres, sans aucune ombre à l’extérieur, sans arbre, le tout entouré de barbelés pour un total de 1200 places. Vraie prison.

Le service d’asile a expulsé de Samos près de 4000 migrants depuis janvier. Impossible d’en connaître les critères: il y a les rejetés, ceux qui attendent une décision, les réfugiés reconnus qui doivent quitter Samos. Chacun se débrouille comme il peut pour payer le billet de ferry, à sa charge bien sûr. Il y a aussi ceux qui essaient de fuir illégalement Samos avec des papiers trafiqués  pour ne pas risquer l’enfermement du nouveau camp.

Pour beaucoup pas de plan prévu à l’arrivée au Pirée – je ne compte plus les messages disant avec angoisse : « je ne sais pas où aller, je dois dormir dans la rue ou dans le parc ». Au pire ce sera le bitume athénien, au mieux ce sera un matelas dans la chambre d’autres réfugiés. Pour d’autres, ce sera une place dans le camp de Ritsona, à 1 heure d’Athènes.

Quasi toutes les demandes d’asile, examinées lors des interviews depuis novembre 2020, sont rejetées, décision communiquée aux requérants au compte-gouttes, sans justification autre qu’un rapide manque de preuves.

Que de colère lorsque l’ONG Avocats sans Frontières à qui j’adresse les refoulés répond :

« Nous ne pouvons rien faire pour vous » lorsqu’on sait que le service d’asile ne propose pas d’avocat disponible pour les recours, pourtant obligation légale. A peine une conversation téléphonique brève, quelques conseils pour les preuves, puis plus rien.

Dans les procédures, le niveau social, le niveau d’éducation, la connaissance de l’anglais, éventuellement du français, sont un atout majeur. Comment défendre sa situation et son dossier lorsqu’on est africain illettré, que l’on ne parle que lingala, bambera ou peul. Il n’y a pas d’interprètes. Que des traducteurs, souvent des réfugiés désignés sans tenir compte des conflits ethniques, qui n’ont pas la qualité requise pour ce métier. Les traductions sont approximatives. Et les fonctionnaires qui jugent n’ont aucune connaissance du contexte politique et social des pays d’origine.

Que de larmes à essuyer, que de corps à soulager, que d’angoisses à apaiser, que d’hommes et de femmes à consoler…

 

Doc Pierre, juillet 2021