Novembre 2021. Pierre-Alain Schmied, médecin bénévole, membre du comité de Choosehumanity, partage ici ses observations au retour d’un premier séjour à Athènes et d’une première collaboration avec l’association Medical Volunteers International (MVI). Merci à lui pour son engagement toujours exemplaire !

Une équipe dynamique, internationale, enthousiaste,  mais avec des conditions de travail et des offres de soins restreintes, plus difficiles qu’à Samos avec Medequali. Les consultations sont dispersées dans plusieurs sites appartenant à d’autres ONG,  avec installations précaires,  parfois sans lit d’examen. On se balade avec un sac de médicaments, au choix très limité … En raison de la pandémie, il n’y a pas de consultation ouverte. Les réfugiés doivent envoyer un message WhatsApp pour solliciter un rendez-vous. Pour beaucoup, la communication est difficile parce qu’ils n’ont pas de téléphone ou à cause du manque de traducteurs francophones ou arabophones. La prise en charge de situations urgentes est quasi impossible.

Les patients sont tous dans une précarité extrême, souvent dénutris. Depuis le 1er novembre, le pass covid est obligatoire pour accéder aux cafés, terrasses, magasins et supermarchés. Cette mesure est imposée aussi pour les consultations médicales. L’accès aux soins est dès lors impossible pour les illégaux…

En dehors de MVI, il reste l’improvisation pour essayer de répondre aux regards de détresse et demandes de soins. Expérience particulière de consulter dans la rue ou la place Victoria en épuisant les réserves personnelles de médicaments, en enseignant les positions et mouvements pour vivre avec son mal de dos, en ajoutant souvent des bons de nourriture ou en achetant des vestes ou chaussures à ceux qui n’ont que des T-shirts et des nu-pieds, grâce à l’action nécessaire de Choosehumanity… Des petits riens qui redonnent un peu d’humanité aux oubliés d’Athènes.

C’est ainsi que j’ai vu sur un pas de porte Madame F, déboutée, donc sans carte de sécurité sociale, qui a depuis une semaine un abcès du doigt qui s’étend progressivement à tout le bras.  Accès aux soins refusé par deux ONG médicales consultées dont une puissante et célèbre « multinationale”. Perplexité en regardant la publicité d’une autre ONG qui annonce des soins médicaux et dentaires spécialisés mais qui soit refuse la consultation soit impose un délai de 2 à 6 mois.

J’ai revu I., déjà mentionné dans un précédent billet, renvoyé pour la 2ème fois de l’hôpital sans examen et sans traitement d’un volumineux kyste comprimant la trachée parce que le  traducteur n’est pas au rendez-vous.

Avec la présidente de Choosehumanity : visite au camp Ritsona, à 1 heure de voiture d’Athènes, pour retrouver des patients de Chios ou Samos. Dégradation importante des conditions de vie dans le camp par rapport au début septembre. La distribution de l’aide financière du UNHCR est confiée à la Grèce depuis l’automne, mais le système est en panne. Aucune aide versée depuis septembre. Toutes les ONG qui distribuaient vêtements et nourriture ou organisaient l’école ou le sport ont été exclues. La nourriture correcte manque. Les barquettes pleines de nourriture douteuse jonchent le sol. Les délais pour une aide médicale sont longs. Aucun médicament donné ; juste une ordonnance qui reste dans les poches puisque personne n’a des euros pour payer la pharmacie qui est à 20 km…

Terrible donc…et malheureusement les conditions de vie des migrants vont encore se durcir…

Tristesse d’être  si démuni devant tant de besoins…

Merci à vous toutes et tous de votre aide, de votre solidarité et de votre empathie.

Retour à Athènes en février avec MVI pour quatre semaines. Car bien sûr, « la lutte continue »…

Doc Pierre