En me rendant à Chios une nouvelle fois fin janvier 2020, j’ai pris le temps de lire l’ouvrage de Jean Ziegler. Le hasard des rencontres a fait que l’une de mes amies le connaissant lui a parlé de Choosehumanity. J’ai écrit à Jean qui m’a téléphoné le jour suivant. Magnifique échange.

Aka, 20 ans tout juste, que Choosehumanity héberge à Chios, a lu l’ouvrage. Et a rédigé un courrier à l’intention de l’auteur que je lui ai fait parvenir. Voici sa lettre :

 

Salut cher Monsieur Jean Ziegler,

Je m’appelle Aka, demandeur d’asile sur l’île de Chios. C’est avec tant d’émotions et de larmes que j’ai pu revivre mon histoire écrite par quelqu’un d’autre. Les maux dénoncés dans votre ouvrage m’ont fait pleurer. Nous réfugiés, nous n’avons jamais choisi de lier notre présent à l’Europe. C’est une situation brusque qui nous a conduit jusque là.

J’aimerais que le monde entier jette un coup d’œil sur ce livre intitulé « Lesbos, la honte de l’Europe ». Afin de mieux connaître l’expression « réfugiés ». Et pourquoi ce brusque déplacement. Nos vies ont basculé, nos rêves se sont éteints. Nous avons perdu toute confiance pendant notre déplacement, les séquestrations, les abus…

Toute cette situation nous laisse croire que nous ne sommes pas des êtres humains. Et une fois arrivé en Grèce, accueillis et conduits dans des centres de réfugiés, la manière dont nous sommes traités nous donne la certitude que nous sommes moins que des êtres humains. Nous avons perdu le sourire, et l’espoir. Et nous nous demandons quand est-ce que nous allons les retrouver.

Comme la cité un contemporain de la littérature engagée Aimé Césaire dans l’un de ses ouvrages, « ma bouche sera la bouche des malheurs qui n’ont point de voix ». Vous avez dénoncé avec bravoure les conditions de déplacement, de voyage, d’accueil, de toutes ces personnes persécutées dans leurs différents pays d’origine. Vous avez inscrit dans votre ouvrage la manière dont sont traités les demandeurs d’asile une fois arrivés sur l’une des îles de la Grèce. Que l’Europe toute entière puisse connaître cette réalité.

Merci d’avoir dénoncé les injustices que subissent les voix sans bouche !”

Aka
Chios, le 3 février 2020