Athènes, ville aux vestiges somptueux qui ont vu naître la démocratie.

Athènes, prison ouverte dans laquelle les droits humains fondamentaux sont bafoués sans que cela ne soit dénoncé. L’on continue à renvoyer en Grèce les migrant·es qui y ont obtenu une protection internationale, mais ne parviennent pas à y survivre et tentent ailleurs de se reconstruire une dignité.

Témoignage de Pierre-Alain Schmied, membre très actif de notre comité, et que nous remercions chaleureusement.

Bonheur de revoir les migrants rencontrés entre 2018 et 2025 au hasard des missions à Chios, Samos, Athènes, Thessalonique. En voir de nouveaux dont plusieurs familles de mères seules avec enfants.

Évidence : la situation empire autant pour les bénéficiaires de l’asile que les recalés. Tous restent en précarité extrême vivant d’expédients et de petits boulots dans le meilleur des cas, ou plus dramatique tombés dans la rue faisant la manche, se nourrissant de reliefs trouvés dans les poubelles.

Je laisse de côté les situations médicales dramatiques sans issue pour parler de I…, africain rencontré à Samos en 2019 et dont la trajectoire d’intégration et d’autonomie est parfaite grâce à son caractère conciliant mais toujours acharné pour construire son avenir en Europe, en soutenant ses deux enfants restés au pays. En Afrique de l’Ouest, l’école, dès l’enseignement primaire, y est ouverte à qui paie…

I… est un réfugié politique dans la trentaine, pas un migrant économique. Il était menuisier dans son pays. La Grèce lui a accordé la protection internationale de l’union européenne attestée par les papiers d’identité de l’UE.

Tout semble optimal et parfait pour reconstruire sa vie.

Et pourtant… Il doit serrer les dents, se faire discret, tout accepter : précarité, humiliation. Un véritable statut d’esclave.

Depuis trois ans, il a un contrat de travail, luxe impossible à la majorité, qui stipule trois jours de 9 heures de travail journalier pour 35€ par jour. Deux semaines de vacances par année.

La réalité est différente.  Depuis trois ans, il travaille 9 heures par jour, 6 jours par semaine. Manœuvre dans la construction, grimpant sans relâche sans baudrier sur des échafaudages sans barrières de protection pour porter de lourdes charges. Pas de pause ou d’aménagement particulier lors de la canicule de juillet. Ses mains ont encore les marques de brûlures dues aux poutres métalliques surchauffées portées à mains nues.

Le salaire officiel hebdomadaire, selon son contrat, est versé sur son compte bancaire : 105€. Les heures supplémentaires ne sont pas payées.

Le solde du salaire pour les 3 jours supplémentaires non déclarés, 195 euros, est payé sous la table,  ce qui exclut une couverture complète d’assurance accident professionnel et une pleine cotisation pour la retraite.

Son optimisme a de la peine à cacher l’angoisse de l’accident, de la chute, entraînant une disparition de tout revenu pour payer logement, nourriture, le soutien à ses enfants, sans compter le risque de précarité, voire d’invalidité.

Bienvenue dans l’eldorado européen.

Prenez soin de vous et des autres

Doc Pierre