Radio Fribourg 4 octobre 2017

Troisième passage « A l’ombre du Baobab » invitée par Thierry Savary. Occasion pour  CHOOSEHUMANITY de promouvoir l’exposition REFUGE qui se tiendra au Café Culturel de l’Ancienne Gare du 7 octobre au 3 novembre 2017 (Vente aux enchères ce jour-là), dès la 35ème minute 🙂

Occasion aussi, et c’est là que réside la magie des rencontres, de vivre un bel échange avec Samba et Vincent Zanetti, du groupe Kala Jula. Une musique dense, toute en finesse, à découvrir.

Suivre le lien pour un voyage sous le baobab !!!!

 

 

Critical error compromises a refugee’s future and his life, August 2017

Syrian citizen, M spent most of his formative years and indeed all his adult life in Damascus, Syria. His father Syrian born, his mother native of a country in North Africa. M fled Syria with his wife and two children. Separated from his family during the journey to Greece, his baggage and with it all his papers were swept overboard during a rough crossing in a crowded rubber dingy. At registration, he could not therefore prove his identity or his nationality. This is not an uncommon occurrence. His wife and children are still lost to him: their location unknown.
Registered in error as a citizen of his mother’s country of origin, the lawyer assigned to his case failed to have his citizenship corrected on his case file, an error critical to his asylum application. His application for asylum rejected twice, he was arrested for deportation to Turkey. For reasons that remain unclear, M was transferred from prison to prison.
When in Chios on transfer between prisons, ELA visited him and took up his case. A stay of deportation is now in place for an as yet undetermined period. While in custody, he suffered a terrible beating: kicked and punched by four police officers suffering injuries to his legs, stomach and back, parts of the body unseen when clothed. Evidence of this beating still remain. During a fire that invaded the prison from the neighbouring camp, he and his fellow prisoners were left locked in a smoke filled cell with flames lapping the windows, while the guards fled to safety. Fellow prisoners were and some still are on hunger strike. One is known to be on hunger strike for 43 days. In all he spent three months in prison before recently being released to an ‘open’ camp, 20 minutes drive from the nearest town and shops.
Yesterday, we met him outside the refugee camp after his recent release from prison – an ‘open’ camp on another island. Together with Doctors without Borders, we went over his case and were given a photocopy of his Syrian passport sent to him by a family member still in Syria. To date there is no news of the whereabouts of his wife and children. A strong, resilient and gentle man, we spent the day with him – the youthful appearance of a man in his early thirties is no longer. He has lost a lot of weight, his hair and beard are now white, his appearance is now of a much older man.
CHOOSEHUMANITY will continue to provide Emergency Legal Aid to M and other cases.

Pensées de Chios, mai 2017

Il était presque 22h30 lorsque le téléphone Alpha a sonné ce soir-là. Avoir le téléphone Alpha, c’est être en alerte durant 24 heures. Répondre à toutes les demandes. Celles de l’équipe (signalements de situations d’urgence), des différents partenaires. C’est aussi et surtout avoir la charge d’organiser une équipe lorsqu’un bateau arrive.

Durant la matinée, un appel avait déjà été lancé : un bateau et 60 personnes récupérés dans les eaux grecques. 60 personnes pleines d’espoir à accueillir dans le port. Cinq heures passées à assumer la mission qui est la nôtre à Chios : attendre le bateau, accueillir les nouveaux arrivants, leur fournir eau et nourriture, vérifier leur état de santé, au besoin les signaler à l’équipe médical. Repérer les mineurs non-accompagnés et autres personnes vulnérables (personnes souffrant de handicaps, femmes seules, personnes âgées). Les regarder s’en aller le cœur toujours serré malgré le cumul d’expériences, ce bus qui les emmène dans le centre de Vial où l’on procédera à leur enregistrement.

Il faisait donc nuit noire lorsque le téléphone a sonné, annonçant le second bateau de la journée. Cette fois-ci, il s’est échoué sur une plage, dans une station touristique de l’île. Lorsque nous sommes arrivés, les derniers passagers quittaient l’embarcation de fortune. Sentir le sable coller sous les chaussures, peiner à avancer, entendre les cris et les pleurs d’enfants, la peur au ventre à l’idée de se retrouver face à une situation dramatique… Des images qui m’ont poursuivies alors que quelques heures plus tard, je cherchais à m’endormir, espérant qu’un nouvel appel, et donc une nouvelle arrivée, ne viendrait troubler une nuit déjà trop courte.

Nous étions peu nombreux dans l’équipe de Chios Eastern Shore Response Team (CESRT) en ce début mai. Une petite douzaine. Sachant qu’une équipe de garde compte 6 personnes, qu’il est difficile d’assumer ce rôle plus de deux nuits de suite, la fatigue se fait ressentir. Soixante nouveaux arrivants, cela représente une charge importante : la nourriture usuelle à promouvoir (un sachet comportant une croissant au chocolat, une barre de céréales, un jus de fruits), l’eau. La pizza lorsque les bateaux arrivent de nuit, que les réfugiés sont restés parfois deux jours sans manger, cachés dans la forêt, sachant qu’ils ne recevront rien durant les heures qui suivent dans le centre d’enregistrement. Chaque arrivée représente un coût de quelques 600 euros, sachant que CESRT dispose d’un stock de vêtements spécialement acquis pour changer rapidement toutes les personnes mouillées (des survêtements aisément utilisables sans être trop précis sur les tailles)..

Les arrivées de bateaux constituent un stress non négligeable. Dans le feu de l’action, nous faisons tous abstraction de nos émotions. Le calme retrouvé, les images remontent. Il importe de debriefer. Et d’être prêt à mener tous nos autres projets… Donner des cours de langues dans le Language Center pour certains, accueillir parents et enfants dans la Children’s House pour d’autres, dresser la liste des besoins dans le camp de Souda et les appartements loués par le UNHCR, distribuer les vêtements, sachant que CESRT est la seule organisation à assumer cette tâche à Chios. Préparer quelques 100 litres de thé en utilisant trois bouilloires, aller le distribuer à Souda en profitant de ce moment pour tisser des liens, vivre de plein fouet l’humanité que nous cherchons à promouvoir, et parfois essuyer des réactions agressives, peut-être parce que notre liberté renvoient les résidents de ces camps surpeuplés à leur impossibilité de se reconstruire une vie, à cet immobilisme engendré par les politiques. Certains y vivent depuis plus d’un an, depuis l’entrée en vigueur de l’accord établi avec la Turquie.

Dans un peu plus d’un mois, les ONG internationales (UNHCR, Save the Children, Médecins du Monde) quitteront les îles grecques, et donc Chios. La gestion de cette crise migratoire incombera aux autorités locales, qui ont déjà bien à faire avec une situation économique catastrophique. CESRT, en tant qu’équipe indépendante locale, restera sur place bien sûr. Et sera sans doute amenée à combler plus de manques encore, en ne pouvant bénéficier d’aucune subvention. Il va sans dire que nous appréhendons tous cette transition. Et que plus que jamais, CESRT et CHOOSEHUMANITY ont besoin de soutien financier, une forme de solidarité de nous tous qui avons la chance de pouvoir vivre dans un environnement paisible et de nous y épanouir, même si parfois, la vie n’est pas si simple pour nous non plus.

Une pensée pour vous tous, qui soutenez notre travail, partagez nos valeurs, choisissez comme nous l’humanité dans le sens le plus profond du terme. MERCI !

Mary Wenker

A l’ombre du baobab – Radio Fribourg 22.02.17

Magnifique moment d’échange ce 22 février 2017 « A l’ombre du Baobab » (Radio Fribourg) avec Thierry Savary, et Alain Scherrer, membre de la RED, maison de rencontres intercuturelles à Fribourg (www.associationlared.ch).

Entre là-bas et ici, un chemin, les mêmes personnes… Celles qui sont au cœur de nos préoccupations et de notre engagement. CHOOSEHUMANITY choisit délibérément de travailler dans un esprit de collaboration. Ce matin a permis de dégager quelques pistes déjà, nous nous en réjouissons !

 

 

Toi mon frère

Tu franchis des plaines enneigées
Traverses des torrents maléfiques
Affrontes des sentiers escarpés
Tu sues, pues, saignes de partout
Tu t’endors au pied d’un arbre
Exténué mais bien vivant
Le souhait juste d’échapper
Aux crocs des chiens ou des hommes
On te prénomme réfugié
On t’a donné un numéro
T’es mon frère, mon père, mon ami
Un être humain comme moi
On t’a volé tes droits
Tes empreintes, tes rêves
J’ai honte pour l’humanité
Je lève le poing au nom de ta dignité

Poussé par un espoir un peu fou
Tu poses un pied devant l’autre
Refoules tes sanglots
Anesthésies tes craintes
Tu souris pour rassurer tes enfants
Tu les serres dans tes bras
En pensant à tes amours
Ceux d’ici, ceux d’ailleurs

Prêt pour l’ultime épreuve
La peur au ventre, la vague à l’âme
Tu poses le pied dans le canot
Tu y installes tous les tiens
Resserres très fort les liens
Ferme les yeux et prie longtemps
Implore les cieux et tous les dieux
Que la mer t’emmène là où tu veux

Ça tangue de partout, ça hurle
L’écume griffe ton âme meurtrie
Des torches vives sondent ta fuite
Tu te fais tout petit, tu coules
Te relèves, scrutes l’horizon
Quand enfin la rive apparaît
Semble si douce, tu as gagné
En pleurs, les tiens contre ton cœur

Tu savais pas qu’ce s’rait comme ça
Un zombie tu es devenu
Vide de tout, tu erres dans le camp
T’oses plus regarder tes enfants
Les voir dormir sous une tente trouée
Pieds mouillés, chemise déchirée
Voir impuissant les rats dévorer
La maigre pitance qu’on t’a jetée

Toi le Syrien, l’Afghan, l’Irakien
Toi d’un autre pays que le mien
Toi qui sculptait tes espoirs
Qui aurait préféré mourir
Sous les bombes ou les tirs
Plutôt que d’agoniser ainsi
Coincé au pied du mur dressé
Par la haine, la peur, l’ignorance